Restauration et conservation textile
L’atelier de restauration, une référence internationale
Son équipe, composée de restaurateurs du patrimoine formés à l’Institut national du patrimoine, veille aux conditions optimales de conservation et d’exposition des œuvres au sein des espaces et gère la restauration des collections. Leur rôle de conseil et de prescripteur en matière de conservation ou de présentation des œuvres fait de l’atelier une référence internationale dans le domaine de la restauration. Plusieurs futures générations de restaurateurs du patrimoine spécialisés en textile ont été formés en son sein.
Un travail de conservation préventive et de précision
La conservation préventive est l’une de ses principales missions. Étape primordiale dans la vie de l’objet, elle permet de diminuer les facteurs de dégradation (poussières, insectes, dégâts d’eau, lumière,…) et d’intervenir de manière minimale et réversible sur les objets. Elle permet ainsi d’éviter des restaurations lourdes et complexes sur les œuvres. Une action qui passe par le contrôle strict des conditions de manipulation, de conservation et de présentation. Les œuvres du musée sont stockées dans des espaces régulièrement contrôlés et surveillés. Une fois traitées, elles sont présentées au public en vitrine ou sous verre pour respecter des conditions optimales de conservation.
La restauration, quant à elle, commence par une étude historique et technique approfondie de l’objet. Réfléchie et adaptée à l’état de conservation de l’œuvre, elle comprend plusieurs étapes de nettoyage, de mise en forme et de consolidation réversibles. Elle permet ainsi de ralentir les dégradations, de protéger et de rendre sa lisibilité à une œuvre tout en respectant son intégrité historique. Une conservation-restauration ne doit pas être confondue avec une restitution ou une reconstitution et ne remplace à aucun moment la pièce originale. Pour répondre aux différentes problématiques soulevées par la restauration des œuvres, un équipement spécifique adapté au travail des pièces de grandes dimensions (table de lavage, table de verre, table aspirante, tables de travail…) et un laboratoire pour les opérations de teinture ont été intégrés à l’atelier.
Enfin, chaque intervention fait l’objet d’un rapport contenant toutes les informations relevées durant l’étude : la description de l’œuvre, son constat d’état, les étapes de restauration et les prises de vue avant, pendant et après le traitement.
L'ACTIVITÉ DE L’ATELIER DE RESTAURATION
LE DESTIN D’UNE ROBE DU XVIIIe AU XXIe SIECLE
Les robes dites « parées » ont connu un grand engouement dans les années 1780-1785, encouragé par les marchandes de modes qui pouvaient ainsi exercer leurs talents sur des productions luxueuses. Les parements deviennent l’élément marquant des toilettes, au détriment des riches soieries brochées, remplacées par des étoffes plus simples.
ROBE COMPOSÉE D’UN CARACO, D’UN JUPON ET DE SA JUPE DE DESSUS
Cette robe a été confectionnée dans un pékin uni dont la simplicité contraste avec la richesse des ornements – broderies, falbalas en gaze, fleurs, paillettes et perles de verre – qui décorent le jupon et la jupe ouverte.
Ces trois pièces semblent avoir été retaillées dans une robe à la française avec un pli plat dans le dos pour se rapprocher d’une silhouette des robes à l’anglaise.
Les fleurs brodées dans le style de Pillement, selon la technique de la peinture à l’aiguille, ornent le bas du jupon et les côtés de la jupe, les grandes compositions fleuries sont complétées d’un simple semis. Les bordures en falbalas sont réalisées dans une gaze de soie plissée, garnie de fleurs obtenues par des applications de soie peinte.
Ce décor est maintenu au bord du jupon, devant et sur les côtés, par des fleurs délicatement découpées dans du satin gaufré et peint à la gouache. Les plis en gaze de soie sont repris très discrètement au niveau des coudes du caraco qui présente une coupe extrêmement simple.
DE LA COUTURIÈRE AU MUSÉE, UNE HISTOIRE DE TRANSFORMATIONS, D’ADAPTATIONS ET D’INVENTIONS
La robe est, par sa facture, une pièce d’apparat dont les transformations témoignent de pratiques largement répandues au XVIIIe siècle.
Les différentes traces de modifications qui nous parviennent inscrivent ce vêtement dans l’histoire du réemploi, d’abord intergénérationnel, les mères léguant à leurs filles leurs toilettes, mais aussi de classe puisque les domestiques recevaient également en héritage les vêtements de leurs maîtres.
La forme du caraco soulève de nombreuses questions car elle évoque un corsage à la polonaise, en vogue dans les années 1780, ce qui renforce l’hypothèse de la datation. Celui-ci se porte avec une robe à l’anglaise, plus décontractée et moins noble que le décor de la jupe ne le suggère. Le changement de style de la robe pourrait donc être le résultat d’un changement de propriétaire et donc d’utilisation : d’apparat, la robe devient un objet plus quotidien, elle pourrait aussi avoir été utilisée plus tard avec la vogue des bals costumés du XIXe siècle alors que les manches conservaient des traces d’agrandissement des manches, ajouts beaucoup plus tardifs.
L’HISTOIRE DE SA RESTAURATION
Le jupon et de sa jupe de dessus ont fait l’objet d’une restauration au musée par l’équipe de Marie Schoefer en 2001, mais à cette date le caraco, inscrit à l’inventaire, demeure introuvable.
Une étude matérielle et comparative du costume, dans l’objectif d’identifier son contexte de création, son utilisation et sa forme originelle, est alors lancée. Afin de préserver l’intégrité de la robe et de pouvoir la présenter au public, la décision est prise de la doter d’un nouveau caraco dont la forme est inspirée d’autres pièces de la collection et de gravures d’époque. Le décor des broderies est imprimé au jet d’encre sur une toile inspirée du pékin qui sert à confectionner un nouveau vêtement. La silhouette finale s’inspire d’une robe à l’anglaise.
En 2017, le haut de la robe est redécouverte dans les réserves avec d’autres vêtements dans une enveloppe, le lien est fait grâce aux décors des broderies, car la coupe s’avère très différente et beaucoup plus simple que la reconstitution, imaginée en 2001.
Restauré en 2024, ce caraco révèle de nombreuses traces d’usage et de modifications – agrandissement ou modification des manches – qui ne permettent pas de connaître sa forme originelle exacte, mais témoignent d’un usage continu entre le XVIIIe et le XIXe siècle. L’hypothèse, formulée en 2001, d’une robe à la française coupée pour créer un caraco à la fin du XVIIIe siècle se confirme.
Bibliographie : Baumgarten Linda, What clothes reveal. The Language of CLothing in Colonial and Federal America, The colonial Williamsburg Collection, Williamsburg, Virginia, Yale University Press, New Haven & London, 2002.